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Mai 2025 | Temps de lecture : 27 Min | 0 Commentaire(s)

Les tours de force d'Artemisia Gentileschi

à l'occasion de l'exposition Artemisia Héroine de l'Art au musée Jacquemart-André à Paris (du 19 mars au 3 août )

Les femmes peintres n'étaient pas légion dans l'Italie de la Renaissance. Interdites de séjour dans les ateliers et non autorisées à prendre des modèles, elles étaient quasiment condamnées à peindre des natures mortes ou des compositions florales. À moins de créer dans le secret de leur chambre des toiles plus ambitieuses inspirées des œuvres de grands maîtres qui fleurissaient sur les murs des églises dont les portes leur étaient par contre évidemment ouvertes. Artemisia Gentileschi n'échappa pas à cette règle dans ses jeunes années même si elle était la fille d'un peintre, ami de Caravage, jouissant d'un certain renom. Déterminée et ambitieuse, elle ne compta que sur elle-même tant pour apprendre à manier le pinceau avec talent notamment dans l'art du portrait que pour poser pour elle-même devant son miroir. Pulpeuses, dotées d'un visage d'un ovale parfait et d'un nez droit et retroussé, toutes les femmes qui peuplent ses toiles ressemblent donc à son Autoportrait en joueuse de luth qui lui valut de nombreuses commandes. Les yeux mi-clos, tout comme sa Vierge à l'Enfant, sa Marie-Madeleine en mélancolie est, à l'inverse de Marie, lascive et prise dans une pose d'une langueur sensuelle rehaussée par un décolleté savant d'une charge érotique plus forte encore que sa Danaé allongée totalement dénudée. Un peu comme son Allégorie de l'inclination peinte lors de sa période florentine tardive dont les courbes généreuses sont plus soulignées que masquées par les étoffes qui les drapent. Deux œuvres apparaissent comme clés parmi toutes les toiles d'Artemisia Gentileschi. Il s'agit d'abord de sa Suzanne et les vieillards. La jeune femme assise au premier plan est nue à un pudique petit tissu près. Derrière elle, deux hommes mûrs la surplombent, l'un lui adressant des paroles qui manifestement la harcèlent avec la complicité du second qui semble lui souffler des encouragements complices à l'oreille. Dans une pause de défense et d'auto-protection, Suzanne est une victime tout comme l'héroïne de son Tarquin et Lucrèce dans lequel l'homme habillé face à la femme nue et allongée la menace d'un poignard de la main droite tout en entreprenant de lui écarter les cuisses de la gauche. La figure du viol qui se dessine ici ne peut qu'apparaître comme un écho du drame réel vécu par Artemisia dans ses jeunes années dont attestent les traces du procès intenté par son père contre son agresseur. Mais les femmes n'en sont pas pour autant des victimes accablées dans son œuvre. Au contraire ! Que ce soit dans Yaël et Siséra ou dans Judith décapitant Holopherne, ce sont des personnages pleins de détermination agissant avec une force résolue pour manier le poignard assassin ou l'épée vengeresse sans haine ni pitié. Le fond noir omniprésent dans ces clairs obscurs n'est évidemment pas sans rappeler Caravage comme si c'était devenu, à sa suite, une figure de style dévolue aux scènes bibliques violentes. Ces femmes qui tuent sans ciller semblent entretenir un rapport naturel au meurtre comme dans Judith et sa servante avec la tête d'Holopherne dont les héroïnes quoique vigilantes ont quasiment l'air de revenir du marché, le panier sous le bras. Comme une préfiguration de la rage froide de Sigourney Weaver dans Alien. Les modèles ressemblaient à l'original. Artemisia Gentileschi était une femme, forte, libre, indépendante capable de quitter son mari pour vivre sa vie et de changer de ville si son inspiration le lui dictait. Elle serait encore exemplaire aujourd'hui.

Illustration :  Judith et sa servante avec la tête d'Holopherne d'Artemisia Gentileschi  (1623)

Judith et sa servante avec la tête d'Holopherne d'Artemisia Gentileschi  (1623)

 

10 nouveaux écrins pour l'art

Partout sur la planète fleurissent de nouveaux espaces muséaux pour lesquels l'architecture se surpasse, inspirée par l'art qu'elle abrite. Connaissance des arts en a répertorié dix des plus beaux spécimens. Le Simose Art Museum près d'Hiroshima s'est doté d'un espace modulaire et mobile formé de containers parallélépipédiques en verre teinté flottant sur une pièce d'eau. Le Blanton Museum of Art d'Austin au Texas a connecté ses deux bâtiments à l'aide de pétales géants formant une canopée qui abrite les visiteurs au milieu d'une végétation luxuriante. Le palais Turinetti di Pergento à Turin a conservé ses salles d'époque pour la peinture la sculpture et le mobilier ancien mais s'est adjoint des espaces d'exposition hyper modernes pour la photographie et la vidéo en sous-sol. À Kristiansand en Norvège, c'est le silo de sa ville qui a été totalement réaménagé pour accueillir la plus grande collection d'art nordique du monde. Le Centre d'art moderne Gulbenkian de Lisbonne qui regroupe la plus importante collection d'art portugais des 20e et 21e siècles a ouvert son espace pour jouer la carte de la transparence tout en s'ornant d 'un gigantesque auvent incurvé d'inspiration résolument japonaise. À Berlin, la mythique Fotografiska s'est implantée au cœur d'un immense projet de rénovation urbaine dans des locaux ayant conservé leur structure de galerie marchande du début du 20e siècle. Le nouveau musée d'art moderne de Varsovie joue la carte d'un minimalisme blanc sur blanc dans l'attente de son futur voisin, un théâtre totalement noir. À Charleston en Caroline du Sud, l'International African American Museum se dresse à l'endroit même où a débarqué la moitié des esclaves arrivant en Amérique du Nord. Comme pour marquer son respect du site, le musée n'est pas posé à même le sol mais surélevé sur des pilotis. Une ancienne poste désaffectée depuis des années à Trondheim en Norvège a offert sa façade majestueuse en granit à un musée d'art contemporain qui donne vie à sa structure porteuse en acier. Le contenant s'apparente au contenu à Wiesbaden en Allemagne où trône une riche collection d'art abstrait d'après guerre augmentée d'œuvres d'Helen Frankenthaler. L'architecture du musée se compose exclusivement de formes géométriques simples avec des salles de dimension variable taillées sur mesure dans le granit blanc pour héberger chaque collection dans un cadre qui lui soit totalement dédié. À travers ces dix exemples se dessine une évidence heureuse : vu les égards que l'on prend pour lui en tous points du globe, l'art a visiblement encore de beaux jours devant lui.

Illustrations : le Simose Art Museum par Shigeru Ban – le Blanton Museum of Art par l'agence Snohetta – le Centre d'art moderne de Gulbenkian par Kengo Kuma  - l'International African American Museum par l'agence Pei Cobb Freed & Partners

le Simose Art Museum par Shigeru Ban  le Blanton Museum of Art par l'agence Snohetta

le Centre d'art moderne de Gulbenkian par Kengo Kuma  l'International African American Museum par l'agence Pei Cobb Freed & Partners

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