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L'ANNUAIRE OFFICIEL DES ARTISTES CONTEMPORAINS
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De l’abstraction géométrique surgit le réel
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Juillet 2023 | Temps de lecture : 22 Min | 0 Commentaire(s)

A propos d’une sélection d’artistes américains établie par Artpress parce qu’ils font exploser les codes à l’intérieur de la règle.

Géo ou plus que géo ? Géométrique ou plus que géométrique ? Le mouvement artistique « néo-géo », dont l’appellation est née de l’abréviation de Neo-Geometric, également appelé néo-minimalisme, a émergé dans les années 1980, lorsque les artistes ont commencé à prôner l’utilisation d’objets domestiques comme des matériaux sculpturaux. Les ressortissants du courant néo-géo utilisent donc des objets et des formes géométriques pour créer des œuvres d’art abstrait comme métaphores de la société. La figure centrale de ce courant d’art étant le peintre américain Peter Halley, né en 1953 à New York, le magazine d’art contemporain Artpress lui consacre un article dans son numéro du mois de mai pour faire un pont entre le mouvement néo-géo et les artistes, tous américains, qu’il réunit également dans son dossier intitulé « Plus que géo ».

Il y a toutefois une différence de taille entre Peter Halley et les artistes réunis dans ce dossier, à savoir Blair Thurman, Lisa Beck, Sarah Braman, John Phillip Abbott, Carl D’Alvia et Beverly Fishman. « Le même rejet du formalisme pur persiste (preuve de la prégnance de celui-ci ?), mais alors que dominaient citations et détournements postmodernes, jusqu’à la parodie, dans le néo-géo, ceci dans la logique de « déréalisation » définie par Jean Baudrillard, ce qui frappe aujourd’hui est au contraire un surgissement du réel au cœur de l’abstraction si l’on peut dire la plus abstraite », lit-on dans Artpress. « Un réel qui mêle aux références picturales des éléments autobiographiques et une culture populaire ou vernaculaire, puisant pareillement dans la musique et le cinéma. Alors, un mix de « op » et de « pop » ? Non, loin du recyclage et de la nostalgie, une explosion des codes à l’intérieur de la règle. »

Et de nous montrer en images l’étonnant bronze Monster (2022) de Carl D’Alvia, l’acrylique sur toile et bois Silver, Black Cosmos (2014) de John Phillip Abott, les lits en acier étrangement superposés de Sarah Braman, dont les draps sont teints à la main, In Bed (how do we sleep when the planet is melting ?) (2016), l’hypnotique huile sur toile Kumamoto Dragon (2014) de Blair Thurman, une vue de l’exposition installation view à la galerie d’art Diane Rosenstein de Los Angeles, où l’on voit trois œuvres d’art à vendre de Lisa Beck : Triangulation (dark globe) (2021), Night and Day II (face 1) (2020) et Elements 10 (2017). Sur cette double page d’entrée sont également visibles la peinture uréthane sur bois de Beverly Fishman, Untitled (Abortion, ADHD, Chronic Pain, ADHD, Anxiety, Birth Control) (2022), et l’acrylique sur toile de Peter Halley, Asynchronous Terminal (1989).

« Si la recherche formelle continue d’être le moteur de leur pratique, les artistes présentés dans ce dossier partagent la même conviction : que la géométrie est bien plus que de la géométrie. Que son lexique devrait également servir à traduire les réalités de notre temps », nous explique Tristan van der Stegen, ayant dirigé sa propre galerie de 2008 à 2012, représentant Carl D’Alvia et John Phillip Abbott, avant de diriger la galerie d’art Xippas Paris et d’enseigner l’histoire de l’art contemporain et l’analyse du marché à l’Ecole d’art et de culture (EAC) à Paris. Comme le disait Peter Halley : « Il ne semble plus possible d’explorer la forme pour la forme (dans le domaine géométrique), (…) ni de vider la forme géométrique de sa fonction signifiante ». Lui-même est probablement, selon Tristan van der Stegen, l’un des tenants les plus célèbres de la direction sartrienne « dans la mesure où elle affirme une position critique à l’égard des questions sociétales, politiques ou économiques ». C’est en effet l’une des deux grandes directions explorées au cours des quarante dernières années, estime le galeriste parisien dans son article pour Artpress.

« La seconde direction s’éloigne des approches discursives ou théoriques. Elle rassemble les artistes s’appuyant sur leurs souvenirs personnels et leurs environnements culturels pour créer des œuvres – avec une combinaison de médiums et d’influences esthétiques inhabituelle », poursuit Tristan van der Stegen. Citant l’exemple de Blair Thurman qui « explore ses fascinations d’enfance et puise ses idées au carrefour de la culture populaire et de ses fantasmes. En ressort un large répertoire de formes archétypales, la plus emblématique étant ses peintures de circuits automobiles, débutées au début des années 1990. » Mais également John Phillip Abbott, dont l’abstraction, même si elle est basée sur les mots, est également tirée de la culture populaire ancrée dans ses souvenirs, où le sport et la musique occupent une place importante.

« A l’instar de Thurman, Abbott utilise ces références comme des moyens lui permettant de mener une recherche formelle et d’ouvrir un champ d’interprétation », constate Tristan van der Stegen. « Une autre approche appartenant à cette vaste catégorie peut être observée dans les œuvres de Lisa Beck. Plus spirituelle et transcendante (Agnes Pelton et Charles Burchfield viennent à l’esprit), Beck use d’une géométrie simple (son symbole le plus courant est le cercle), de matériaux réfléchissants et de la peinture pour inviter le spectateur à considérer les cellules et les planètes sur le même plan. »

Si les sculptures de Carl D’Alvia et de Sarah Braman sont présentées dans ce dossier, c’est pour plusieurs raisons.  « Bien que ces deux artistes explorent des esthétiques différentes », admet le marchand d’art, « leur façon d’aborder l’abstraction géométrique est ancrée dans la réalité. Les monolithes colorés de Carl D’Alvia, (des œuvres d’art à vendre présentées à Paris à la galerie d’art Hussenot en 2022), dialoguent avec le minimalisme (John McCraken, en particulier). Cependant leurs courbes communiquent des émotions telles que la fierté, la résignation ou le désespoir, rappelant les débuts de l’animation par ordinateur. Les vitres colorées de Sarah Braman font écho à l’héritage des sculpteurs minimalistes (Robert Irwin ou Larry Bell), mais elle les associe avec d’autres éléments vernaculaires ou banals tels que des chaises trouvées, des morceaux de ferraille ou des troncs d’arbre. » Comme l’écrit un peu plus loin au fil des pages l’historienne et critique d’art Andrea Alvarez à propos de Sarah Bramen, « ses sculptures invitent en effet les regardeurs à réfléchir à la manière dont la fonction utilitaire, l’histoire du design, l’esthétique et la spiritualité contribuent continuellement à façonner notre environnement ». C’est plus que géo !

 

Illustration : Carl D'Alvia - Monster, 2022 - Bronze - 35 x 22 x 24 in 88.9 x 55.9 x 61 cm
Edition of 3 and 1 artist proof

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