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La sculpture fait son come-back
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Avril 2023 | Temps de lecture : 29 Min | 0 Commentaire(s)

A propos du grand retour des sculpteurs dans les foires et les galeries d’art.

Après le grand retour de la peinture, voici venu le grand retour de la sculpture ! Le numéro de février de Beaux Arts Magazine consacre un dossier très ludique à ces sculpteurs aujourd’hui propulsés sur le devant du marché de l’art contemporain, en nous proposant une petite sélection non exhaustive de vingt-quatre d’entre eux, répartis en cinq grandes tendances : les plus écologistes, les plus mythologiques, les plus revendicatifs, les plus extraterrestres et les plus facétieux. Dont certains pourraient même cocher plusieurs cases. Où l’on constate que les nouvelles œuvres d’art à vendre ont merveilleusement su réinventer la traditionnelle statuaire, dans la lignée des Claes Oldenburg ou Michel Blazy

« A l’heure où l’on déboulonne ou renverse les statues, manifestation d’une révolte contre tout un pan de l’histoire, les bases mêmes de la statuaire se trouvent ébranlées », écrit Judicaël Lavrador dans son article pour Beaux Arts Magazine. « Socles, piédestaux… autant d’éléments intimidants qui semblent voués à disparaître. Pour toute une génération d’artistes, sculpter s’apparente désormais à représenter tout genre de sujet mais aussi tous ceux qui étaient exclus ou humiliés par l’art de la statuaire auparavant. Comme si la sculpture était devenue l’un des vecteurs d’une passation de pouvoir. Soucieuse de ne plus célébrer ni consacrer, elle propose à contrario de figurer d’autres personnes, d’autres formes de vie, d’autres histoires. Quitte à se détacher du réel. »

Dans la catégorie « les plus écologistes », on constate à quel point la sculpture et les installations d’art contemporain ont désormais vocation, non plus à créer du lien avec les spectateurs, mais à les reconnecter avec la nature. Représentée par la galerie d’art 50 Golborne, à Londres, Ranti Bam crée « des espèces de boîtes magiques recelant mille promesses » en modelant la terre, tandis que l’artiste Hélène Burtin a par exemple conçu « un chemin constellé de poteries qui mène à une grande tente drapée de céréales », en plus d’être la commissaire d’expositions et historienne ayant contribué à la redécouverte de Valentine Schlegel (1925-2021), une sculptrice qui réalisa d’admirables cheminées aux formes anthropomorphiques. La désormais parisienne représentée par la galerie d’art Crèvecoeur, Anne Bourse, fait des cocons de ses expositions en les ornant de rideaux, coussins et matelas cousus et peints à la main. Et la jeune artiste originaire de Montpellier, Amandine Arcelli, élabore des sculptures ramifiées et aériennes avec des matériaux utilisés dans le secteur du bâtiment.

Dans la catégorie « les plus mythologiques », les sculptures déjouent les canons classiques pour mieux se jouer des proportions ou des matériaux. « Les figurines pince-sans-rire de Nicolas Party ont la grosse tête comme au carnaval ; les créatures aquatiques ou célestes de Jean-Marie Appriou ont les yeux qui s’écarquillent tandis que leur chair se fripe ; le chien plat de Zohreh Zavareh se tient couché, dévertébré dans son corps de latex », observe la journaliste. « Ce petit peuple difforme regroupe les hérauts d’un nouveau grotesque qui déteint, par sa truculence et sa bizarrerie parfois monstrueuse, sur les austères cubes blancs des galeries d’exposition. Mais il y a autre chose. Ces œuvres d’art intriguent par leur part de mystère et leur charge narrative (…) Elles n’ignorent pas les mythes anciens, les contes et les légendes obscures, tirés d’un large éventail de civilisations, sans se priver d’ailleurs d’entremêler ces sources d’inspiration. » Ainsi Stefan Rinck, représenté par la galerie d’art Semiose à Paris, utilise-t-il la taille directe de la pierre pour créer un bestiaire aux mutations mythologiques ou légendaires. Quand Tarik Kiswanson, représenté par la galerie d’art Carlier Gebauer à Berlin et Madrid, a bouleversé l’ordre du monde au musée Guimet lors de la dernière biennale de Lyon, en fixant au plafond de vieux bureaux trouvés sur place et en y suspendant des formes blanches comme des cocons ou des bulbes, pour parler de déracinement, de mémoire et de fragilité.

Dans la catégorie « les plus revendicatifs », les artistes contemporains semblent avoir pour mission de remettre les invisibilités à la verticale. Les œuvres d’art à vendre de Huma Bhabha, artiste pakistanaise représentée à Los Angeles et New York par la galerie d’art David Kordansky, sont des sortes de totems néo-pop, aussi intimidants par leur corpulence que subtils par leur surface peinte et leur facture composite. Couronnée du Lion d’or à la dernière biennale de Venise, représentée à New York et Los Angeles par la galerie d’art Matthew Marks, Simone Leigh y avait recouvert le toit du pavillon américain de raphia pour y dresser ses altières sculptures de femmes noires. Et les sculptures de géants décharnés de Thomas Houseago, représenté par les galeries Xavier Hufkens (Bruxelles) et Gagosian (New York-Londres-Paris), parlent puissamment de force et de fragilité. Quant aux sculptures graphiques de Daniel Otero-Torres, représenté à Paris par la galerie d’art mor charpentier à Paris, elles sont beaucoup plus graves qu’il n’y paraît, tant la dimension de reconstitution historique est présente dans les mises en scène de l’artiste colombien qui travaille à partir d’événements sociaux, écologiques et politiques ayant marqué l’Amérique latine.

Dans la catégorie « les plus extraterrestres », les sculptures de Renaud Jerez, représenté par la galerie d’art Crèvecoeur à Paris, jouent de leur audace chromatique pour placer leurs corps de mutants dans un halo futuriste. Celles de Mire Lee, l’artiste coréenne représentée par la galerie d’art Tina Kim, à New York, sont faites d’acier, de silicone, de plâtre et de plastique pour mieux livrer une image de la complexe tuyauterie de la physionomie du vivant. Comme les sculptures de verre soufflé d’Andra Ursuta, elles ont fait sensation à la dernière biennale de Venise, tandis que les mannequins minéraux de Bojan Sarcevic congèlent leur puissance narrative à grand renfort de glaçons, et que les géants hybrides du jeune Hugo Servanin se déploieront du 17 mars au 7 mai dans les espaces des Magasins généraux, à Pantin.

Enfin, dans la catégorie « les plus facétieux », on pense à la Casserole de moules fermées de Marcel Broodthaers tant les artistes plasticiens font des vanités contemporaines de tous les objets à leur disposition. Ainsi le bouleversant gisant dans son sac de couchage de Gavin Turk, le bluffant bronze peint de Mungo Thomson donnant l’illusion d’une pile de cartons, l’émouvant pissenlit hyperréaliste de Tony Matelli, ou les poétiques pelures d’orange de Francesco Gennari. Et que dire des sculptures et vidéos de Julian Charrière mettant en scène les catastrophes induites par l’homme à l’ère de l’anthropocène… si ce n’est aller les voir dans l’exposition « Les portes du possible – Art & science-fiction » qui se tient au Centre Pompidou-Metz jusqu’au 10 avril.

 

Illustration : Tina Kim gallery

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