Quand la littérature ne laisse pas de marbre

A propos de la récente sortie de résidence d’Alice Guittard, créatrice de natures mortes en marqueterie de marbre.

Y a-t-il encore de la place pour les poètes dans ce monde ? Parce que Ghérasim Luca pensait que non, il a mis fin à ses jours en 1994, à 80 ans, en se jetant dans la Seine… Mais Alice Guittard, née à Nice en 1986, imprégnée de toute la densité poétique de ses études de géographie et d’archéologie, rencontre « Héros-limite » en 2005. L’une de ses fameuses poésies vertiges. « Femme cou, coucou, femme coupée pain, comme un pain, en deux, coupée en deux avec une, elle a vécu en paix, en deux, coupée en deux avec une scie, si si avec une scie fine… » En digne représentante de l’art contemporain, elle se lance dans une collaboration post mortem avec Ghérasim Luca. S’éprend de l’écriture de Camus aussi. Mêle édition, sculpture, performance, dessin, photographie… « préférant aux résultats tangibles des solutions imaginaires et aux routes toutes tracées leurs chemins de traverses », écrit-elle.

Et puis elle rencontre en 2016 un graveur de tombe. Sur le chemin d’Alice, les visages photographiés se mettent à épouser le marbre. On pense aux portraits du Fayoum. A moins que des mains ne s’incrustent sur la pierre quand elle découvre cette technique de marqueterie à Istanbul en 2018, parce que sa chimie photosensible s’est fait refouler aux frontières. Les plaques de marbre d’Alice Guitter, tranchées sous haute pression avec une finesse inégalée peuvent désormais représenter aussi des vases, des fleurs ou des clés… Elle sort tout juste d’une résidence d’artiste à Lisbonne, et Richard Leydier lui consacre son « introducing » dans le nouveau numéro d’Art Press, magazine des artistes contemporains. De quoi motiver une recherche sur les sites de galeries d’art et donner des envies d’achat d’œuvres d’art contemporaines.